Ce qu’il exprime avec les mots classiques de la spiritualité de son temps, c’est un passage qui concerne le goût : le passage de l’amer au doux, pour l’âme et le corps. Ce n’est pas pour rien que cette expérience touche son corps : non seulement François n’est pas un intellectuel, mais surtout il n’est pas d’expérience spirituelle qui ne transforme le corps -et l’âme, qui ne rénove les sens extérieurs et intérieurs.
Ainsi François fut libéré du regard d’emprise et de calcul, hérité du marchand, il devint capable d’entendre le chant de la création, il ne cherchait plus à séduire, il n’avait plus rien à perdre, il n’avait plus peur de quiconque, de toucher le lépreux, de serrer la main du brigand, de recevoir l’accolade du sultan d’Égypte, il goûtait la moindre aumône en nourriture comme un festin de roi. Et surtout, il fut rendu capable de reconnaître en toute chose et en tout être, en particulier des plus humbles, l’empreinte de son Créateur, et la présence symbolique, discrète mais vivifiante, du Christ. C’est peut-être la deuxième révélation qu’il reçut chez les lépreux.
Isaïe 53 « Nous l’avons considéré comme un lépreux, frappé de Dieu et humilié... »