Un
vitrail, vu dans l’obscurité, ne donne aucune impression de magnificence, même
si on en connaît tous les détails. Ce n’est que dans la clarté du jour qu’il
prend vie.
Il en
est de même de l’enseignement divin. Les Apôtres ont suivi Jésus, ils l’ont vu
mourir sur la Croix et ressusciter trois jours après. Leurs rêves s’écroulent.
Ils n’ont rien compris. Ils voient qu’il n’y aura pas de royaume d’Israël, que
toutes les promesses des prophètes valent aussi bien pour les gentils que pour
eux-mêmes. Ils sont déçus. Le Maître ne revient pas.
Mais
soudain, comme un vitrail qui s’illumine, le vrai visage de Jésus leur apparaît
dans toute sa splendeur. Le jour de la Pentecôte, ils sentent la brûlure d’un
feu mystérieux, et leurs intelligences s’éclairent, leurs cœurs s’ouvrent à
l’Amour. Au-dedans d’eux-mêmes, ils découvrent Jésus. Ils comprennent le sens
des Paroles qui leur ont été dites. Et Pierre se souvient… « Lorsque tu
étais jeune, tu allais où tu voulais, mais quand tu seras vieux, un autre te
ceindra et tu iras où tu ne veux pas aller. » (Jn. 21:18)
Il faut
en effet, se laisser faire, laisser Dieu agir en nous. Et Pierre découvre le
vrai Dieu ! Le Dieu vivant qui est au plus intime de son cœur, le Dieu qui
a tout fait par Amour, le Dieu qui appelle sa créature, le Dieu qui meurt pour
la sauver, pour briser la carapace de son cœur qui s’est trop longtemps refusé.
Et
Pierre comprend le mystère de la Croix, le mystère de l’Amour d’un Dieu. La
rencontre est consommée. Le disciple devient cri d’amour, il lâche ses
espérances de chair pour se donner à Dieu et au prochain. Il est au cœur du
premier Amour. Il partira à la conquête du monde. Tel est le Dieu que nous
avons à retrouver au plus intime de nous-même, dans le feu de la Pentecôte.
Quelle est en nous la naissance de la religion ? C’est une voix que nous
percevons au-dedans de nous, une voix qui est l’Amour et qui nous demande
l’amour. Qu’admirons-nous dans les Saints ? Ce que nous admirons, c’est
une Présence que nous portons en nous et qui s’incarne en eux avec une beauté
particulière.
Pour
être assuré de l’existence de Dieu, il suffit d’écouter en notre âme cet appel
incessant à la beauté, à l’Amour. Il y a en effet en nous Quelqu’un qui n’est
pas nous, Quelqu’un qui demande à se réaliser en nous, mais qui ne peut le
faire sans nous.
Nous
avons en nous un trésor immense et nous savons bien qu’en le trahissant, nous
éteignons une lumière, nous devenons mur opaque. La valeur infinie, vivante en
nous, valeur qui couronne de splendeur tous nos sacrifices, ne peut régner, à
travers nous, sans le consentement de notre cœur.
Maurice Zundel (notes de Pentecôte 1936)