"Jésus donc, fatigué par la route, s'était assis
au bord du puits. C'était environ la sixième heure. Déjà commencent
les mystères. Car ce n'est pas sans raison que Jésus est fatigué ; car ce n'est
pas sans raison qu'est fatiguée la Force de Dieu : car ce n'est pas sans raison
qu'est fatigué celui qui refait les forces des fatigués ; car ce n'est pas sans
raison qu'est fatigué celui dont l'abandon cause nos fatigues, dont la présence
nous réconforte. Jésus cependant est fatigué, et il est fatigué par la route ;
il s'assied, et il s'assied au bord du puits, et c'est à la sixième heure qu'il
s'assied, fatigué. Tous ces détails signifient quelque chose, ils veulent
indiquer quelque chose ; ils nous rendent attentifs, ils nous exhortent à
frapper. Qu'il nous ouvre donc lui-même, et à nous comme à vous, celui qui a
daigné nous exhorter en disant : Frappez et l'on vous ouvrira. C'est pour toi
que Jésus est fatigué par la route. Nous trouvons Jésus qui est la Force même,
et nous trouvons Jésus qui est faible. Jésus fort et faible, fort car au commencement
était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu ; il
était au commencement auprès de Dieu. Veux-tu voir à quel point ce Fils de Dieu est fort ? Tout par lui a été
fait et sans lui rien n'a été fait, et sans peine il a tout fait. Qu'y a-t-il donc de plus fort
que celui par qui, sans peine, tout a été fait ? Veux-tu connaître sa
faiblesse ? Le Verbe s'est fait chair et il a habité parmi
nous. La force du
Christ t'a créé, la faiblesse du Christ t'a recréé. La force du Christ a donné
l'existence à ce qui n'était pas, la faiblesse du Christ a préservé de la mort
ce qui était. Il nous a créés par sa force, il nous a recherchés par sa
faiblesse.
[...] Vient une femme. Figure de
l'Eglise qui n'était pas encore justifiée, mais qui allait bientôt le devenir,
car telle sera l'œuvre de la parole. Elle vient sans rien savoir, elle le
rencontre, et il s'entretient avec elle. [...] Ecoutons-nous donc en elle,
reconnaissons-nous en elle et en elle rendons grâce à Dieu pour nous. Elle était
une figure en effet, et non pas la réalité ; et parce qu'elle-même offrait par
avance une figure, elle est aussi devenue réalité. Car elle a cru en celui qui
nous la proposait comme figure. Elle vient donc puiser de l'eau. Elle était venue
simplement puiser de l'eau, comme les hommes ou les femmes ont coutume de le
faire...."
Saint Augustin, Homélie XV sur l'Evangile de Jean