Une femme couronnée d'étoiles. La douceur de Marie dans la femme de l'Apocalypse. La douleur de Marie. Douleur d'enfantement. Douleur devant la Croix du Bien-Aimé. Douceur de Marie devant les hommes, douleur par les hommes.
Je ne sais pas pour quoi j'écris. Peut-être pour rien, parce que les mots s'appellent l'un l'autre, se puisent au silence quand la réflexion s'abîme dans la pure nuit, celle qui est inondée d'indicible lumière. Pure lumière.
Je vois cette pureté-là, lumière et nuit une, ce lieu où tout se tait, où la pensée se perd et se trouve tout ensemble, hors d'elle-même. Silence inaltérable et sublime. Au delà, la tendresse de son sourire. La pureté de ses larmes. Les deux ensembles.
Marie, toute pure, prie pour nous, pécheurs.
Il n'y a pas d'images. Il y a son visage penché et ses larmes claires. Il y a ce geste si tendre, cette main tendue vers nous, ce sourire, cet appel comme un soupir. Il y a la plainte de notre douce Mère. Il n'y a pas d'images dans mon cœur, mais ces larmes et ce sourire sont et demeurent.
Notre Dame de la Salette, notre Dame de Livron, notre Dame du Bel Amour...
Les mots éclosent comme des fleurs pâles. Ils se marient et s'effacent, ils peignent devant moi la beauté de Marie, et l'infinie souffrance d'une mère pour ses enfants. Pour son Fils. Toute adorante, toute offerte, toute transparente, toute rayonnante.
On imagine souvent une gloire de Dieu tonitruante. Mais sa gloire au profond du silence, l'éclat vertigineux de la douceur de Marie... nulle ombre n'y subsiste, nulle obscurité n'y trouve refuge, et elle, pourtant, accueille toute humanité comme elle a accueilli l'Esprit... nul combat en Marie si pure, inaliénable douceur offerte à son Seigneur, celle de l'enfance, l'innocence fragile et veloutée d'un nouveau-né.
Nul combat en Marie. Le sourire et les larmes ensemble, la ténèbre qui se dissout, disparaît en elle comme brouillard au matin. C'est le soleil de justice, le grand feu de l'amour qui arde et s'apaise en elle, qui s'offre en elle à notre humanité et s'y révèle sans bruit.
Marie Porte du Ciel, prie pour nous, pécheurs.
Bernadette n'a pas reconnu le visage de la Dame de Massabielle dans cette grande statue qui se voulait fidèle.
Marie que je ne vois pas mais qui est, par l'amour de Dieu, ne faudrait-il pas la contempler au travers de la transparence de l'eau, de l'air frais au matin, des larmes qui perlent comme rosée à la joue d'une enfance qu'elle met au monde chaque jour ?
Elle que je ne vois pas mais qui est, par la grâce de Dieu, ne s'offre-t-elle pas comme un lieu de rencontre, toute oublieuse d'elle-même, toute Mère ?
Il le savait, le Bien-Aimé en Croix, qu'il nous offrait sa mère non seulement pour qu'elle nous prenne par la main et nous conduise à lui, mais bien pour qu'elle nous accueille et nous fasse renaître, non pas d'elle telle qu'en elle-même, mais d'elle telle qu'elle est dans la gloire de Dieu, tant donnée que la Sainte Trinité peut transparaître et, par sa maternité, nous recréer d'eau et d'Esprit.
Marie comblée de grâce, mère de l'Eglise, prie pour nous, pécheurs.
Il n'y a plus devant moi, autour de moi, que la douceur des larmes de Marie, la douleur de son sourire, cette attente qu'elle a de nous, non pas pour elle, mais pour Lui, le Tout Autre, le Tout Proche, en Croix. Elle qui est toute entière habitée de la splendeur de la Résurrection, elle qui pleure l'enfantement du monde, elle nous présente à chaque instant l'amour de son Fils crucifié en nous et par nous sans remords...
Mystère de Marie. Mystère d'une Femme, couronnée d'étoiles, qui souffre dans les douleurs de l'enfantement.
Marie de la rencontre, Notre Dame des Béatitudes, prie pour nous pécheurs.
La claire nuit s'est refermée sur la pureté transparente de ma Mère. Elle m'a fait cadeau de ses larmes. Je pensais plus tôt à ce grand combat qui se joue bien au delà du monde et qui pourtant menace de le submerger. Nul combat en Marie. Juste la Croix pleine, simple, tellement simple dans la lumière de la Résurrection, juste les Béatitudes offertes toutes entières, avec la souffrance et la joie une.
Marie, Mère de Dieu, prie pour nous pécheurs.
Marie, ma Mère, tu m'as dévoilé ce soir les larmes de Dieu. Qui d'autre que toi peut nous les révéler, qui d'autre qu'une femme toute entière femme.
Marie, ma mère, prie pour moi pécheur...
M.Felix, "Les nuits de feu"